09 août, 2023

Phénomène de fatigue dans la conception des structures industrielles en acier – Partie 2

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Dans la première partie de cet article de blogue, nous avons commencé à expliquer la conception et la résistance des éléments en acier de construction ainsi que les facteurs qui ont une incidence sur la durée de vie en fatigue. Nous avons appris qu’il faut tenir compte de nombreux détails lorsque l’on conçoit des éléments de structure, et qu’il est important que les ingénieur·e·s-praticien·n·e·s comprennent bien les principes fondamentaux de la fatigue et de la cassure dans la conception d’ingénierie. Nous allons à présent recenser d’autres facteurs ayant une incidence sur la durée de vie en fatigue, proposer des stratégies de remise à neuf et expliquer comment calculer des contraintes de point critique et la durée de vie en fatigue restante. Si vous n’avez toujours pas lu la Partie 1 de cet article de blogue, nous vous suggérons de le faire avant de lire la Partie 2.

  1. Taux de propagation des fissures

    Le fait de prévoir le taux de propagation d’une fissure pendant un cycle de charge permet de remplacer des éléments endommagés avant que la longueur de la fissure ne devienne critique. Il est possible de mettre en corrélation le taux de propagation d’une fissure avec la variation cyclique dans les facteurs d’intensité de contrainte :

    da/dN = A.DKm [3]

    Où da/dN correspond au taux de propagation de la fissure par fatigue par cycle, DK = Kmax – Kmin correspond à la plage du facteur d’intensité de contrainte pendant le cycle, et où A et m représentent les paramètres qui dépendent du matériau, de l’environnement, de la fréquence, de la température et du rapport de contrainte. L’équation est également connue comme étant la Loi de Paris (Fig. 1).

  2. Courbe S-N

    Les courbes S-N (également appelées courbes de Wöhler) sont des graphiques avec une ligne linéaire à pente constante, tracés à l'aide d'une relation log-log (Fig.2). Les courbes S-N sont utilisées pour évaluer la durée de vie en fatigue d'une pièce lors de la phase de conception. Les courbes S-N sont basées sur la plage de contrainte de la pièce, combinée aux cycles jusqu'à la rupture et aux propriétés matérielles de la pièce. En mode de fatigue à cycles élevés, il est courant d'appliquer la courbe S-N pour déterminer le comportement de l'élément et l'impact des charges cycliques sur l'élément. Au fil du temps, ces modèles ont été développés pour décrire les relations entre la charge cyclique et le nombre de cycles jusqu'à la rupture.

    Pour estimer le tracé d’un graphique S-N, il faut insérer des points de données d’essais de fatigue concernant des cycles à la rupture. La relation entre les cycles à la rupture et la contrainte appliquée est considérée comme linéaire étant donné que la méthode de tracé est habituellement présentée sous la forme logarithmique, obtenue à partir d’un modèle de régression.

    La plupart des codes de conception actuels limitent le seuil de contrainte haute en fatigue à un nombre précis et établissent différentes courbes logarithmiques SN pour différentes conditions de charge. La courbe S-N devrait plutôt être une courbe de contrainte-cycle-probabilité (S-N-P) afin de prendre en compte la probabilité de rupture après un nombre donné de cycles de contrainte précis.

  3. Accumulation de dommages de fatigue

    Les dommages de fatigue sont un processus d’accumulation cycle après cycle d’un matériau soumis à des contraintes et à des déformations variables. Il est possible de calculer la durée de vie en fatigue en utilisant la méthode d’analyse S-N et en prenant pour hypothèse un endommagement cumulatif linéaire (règle de Palmgren-Miner), plus particulièrement lorsque la charge de fatigue appliquée n’est pas constante. Lorsque la répartition de l’étendue des contraintes à long terme est présentée sous la forme d’un histogramme de contraintes, ce qui consiste en un un nombre opportun de blocs d’étendue de contraintes constantes (Δσi), chacun des blocs comportant un certain nombre de répétitions de contrainte (ni), le critère de fatigue se lit comme suit :

  4. Où :

    D = dommages de fatigue accumulés

    a = point d’intersection de la courbe S-N nominale avec l’axe logarithmique N

    m = pente inversée négative de la courbe S-N

    k = nombre de blocs de contraintes

    ni = nombre de cycles de contraintes dans le bloc de contraintes i

    Ni = nombre de cycles jusqu’à la rupture à l’étendue de contrainte constante Δσ

    i = facteur d’usage

    Lorsqu’on applique un histogramme pour exprimer la répartition des contraintes, le nombre de blocs de contraintes (k) devrait suffire pour garantir une précision numérique raisonnable.

  5. Stratégies de remise à neuf des éléments de structure endommagés par la fatigue

    Lorsqu’on est confronté à des problèmes liés à la fatigue, il est impératif d’appliquer une stratégie de réparation ou de remise à neuf pour corriger les problèmes en question et prévenir l’apparition de problèmes supplémentaires. Les particularités de la stratégie de réparation dépendent de la nature des dommages et du problème; cela dit, il existe plusieurs stratégies générales de réparation et de remise à neuf couramment appliquées à presque toutes les conditions de fatigue. Ces stratégies incluent une bonne compréhension de l’origine de la fissure, la conception d'un détail de réparation et la validation de ce détail.

    Les particularités de ces trois étapes dépendent des caractéristiques de fatigue propres à l’élément de structure concerné, et chaque étape est essentielle pour mener à bien la stratégie de réparation ou de remise à neuf. De plus, la validation de la solution de réparation visant à empêcher l’apparition d’un nouveau problème, ou l’amplification de la propagation de la fissure dans d’autres parties de l’élément de structure, est une étape très importante pour approuver le détail de réparation (Fig. 3 et 4).

  6. Calcul des contraintes de point critique et de la durée de vie en fatigue restante à l’aide d’une analyse par la méthode des éléments finis (EF)

    Une analyse par éléments finis approfondie des structures pourrait compliquer l’évaluation de la « contrainte nominale » à utiliser avec la courbe S-N, étant donné qu’une partie du facteur de concentration de contrainte locale est prise en compte dans la courbe S-N. Dans bien des cas, il peut s’avérer plus commode d’employer une autre stratégie pour calculer des dommages de fatigue lorsque des contraintes locales sont définies à partir d’une analyse par éléments finis. Lorsqu’on élabore le modèle à éléments finis, il faut que le maillage soit suffisamment fin pour prédire convenablement les points critiques de l’élément soumis à la fatigue. Il est également important de prévoir un changement continu, et pas trop brusque, dans la densité du maillage de l’élément aux endroits où les contraintes de point critique doivent être calculées. Par ailleurs, la dimension du modèle devrait être suffisamment grande au point que les résultats calculés ne soient pas trop affectés par les hypothèses émises concernant les conditions aux limites et l’application des charges.

    Après avoir calculé les points critiques, il faut évaluer les points de contraintes à une distance de 0,5 t et 1,5 t par rapport au point critique, où « t » correspond à l’épaisseur de la plaque (épaisseur de la plaque à la bordure de cordon de soudure où le point critique du point de raccordement est évalué). Ces endroits sont également désignés « les points de mesure pour l’extrapolation de la contrainte ». Les valeurs de contraintes de point critique doivent être comparées avec la limite supérieure de fatigue spécifiée au moyen d’une analyse linéaire (Fig. 5).

    Dans une autre approche, s’il s’avère nécessaire de faire un modèle des discontinuités stationnaires, telle qu’une fissure, la méthode classique des éléments finis exige que le maillage se conforme aux discontinuités géométriques. Il est donc nécessaire de raffiner significativement le maillage dans la zone de la pointe de fissure pour enregistrer les champs asymptotiques singuliers de manière appropriée.

    La modélisation d’une fissure en cours de propagation est encore plus fastidieuse, car le maillage doit être mis à jour en permanence pour concorder avec la géométrie de la discontinuité à mesure que la fissure progresse. La méthode des éléments finis étendus (XFEM) permet de pallier les lacunes associées au maillage de la surface des fissures. Il s’agit d’une évolution de la méthode des éléments finis classique qui permet d’introduire facilement des fonctions d’enrichissement local dans une approximation par éléments finis. La présence de discontinuités est assurée par les fonctions enrichies spéciales conjointement avec des degrés de liberté supplémentaires (Fig. 6). En revanche, le cadre des éléments finis et ses propriétés, telles que la sparsité et la symétrie, sont conservés.

  7. Conclusion

    Nous venons de présenter les nombreux facteurs ayant une incidence sur la durée de vie en fatigue des structures en acier, ainsi que des stratégies et des façons de calculer la durée de vie en fatigue. Bien évidemment, la conception des structures en acier suppose bien d’autres étapes. Si vous avez besoin de plus amples renseignements ou si vous souhaitez obtenir de l’aide pour régler des problèmes touchant vos structures en acier, n’hésitez pas à communiquer avec nos experts. Nous sommes là pour vous aider.

  8. Références [anglais seulement]

    ANSI/AISC 360-16 Specification for Structural Steel Buildings, American Institute of Steel Construction, Révisé juin 2019

    AASHTO LRFD Bridge Design Specifications, 9th Edition- American Association of State Highway and Transportation Officials, Nov. 2021

    NHI Course No. 130122, Design and Evaluation of Steel Bridges for Fatigue and Fracture- US Department of Transportation Federal Highway Administration, Déc. 2016

    Abaqus/CAE User's Manual 2023- Dassault Systèmes, Nov. 2022

    DNVGL-RP-0005:2014-06, RP-C203: Fatigue design of offshore steel structures, Det Norske Veritas (DNV), Juin 2014

    Spectrum Fatigue Lifetime and Residual Strength for Fiberglass Laminates, Wahl, Neil K., Montana Tech of the University of Montana, Mars 2002

    A Fatigue Primer for Structural Engineers, Fisher, John W., Kulak, Geoffrey L., & Smith, Ian F. C., National Steel Bridge Alliance, Mai 1998

    Reliability-Based Management of Fatigue Failures, Structural Engineering Report No. 285, Josi, G., & Grodin, G.Y., University of Alberta, Department of Civil and Environmental Engineering, Fév. 2010

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