En effet, les clients et les investisseurs portent une attention croissante aux actions environnementales des entreprises dans un contexte d’acceptabilité sociale, ce qui peut avoir une incidence sur les décisions qui seront prises en matière d’investissement. Pour cette raison, bon nombre d’entreprises se sont dotées au fil des ans de critères environnementaux stricts afin de mieux gérer les risques sur l’environnement et de les réduire. Les suivis environnementaux au moyen d’analyses de la toxicité sont des outils indispensables pour permettre de vérifier et de contrôler la qualité d’une eau rejetée à l’environnement et, qui plus est, de détecter la toxicité d’un effluent.
Toutefois, une fois les résultats des analyses en main, dénicher la source de la toxicité peut être un processus complexe. Cet article aborde certains aspects à prendre en compte lors de l’évaluation des rejets pour réduire les risques d’émissions toxiques ainsi qu’une méthodologie à adopter pour faciliter la considération de toutes les sources possibles de toxicité.
La toxicité : une définition
Selon la Loi canadienne sur la protection de l’environnement, on entend par toxique toute substance qui pénètre ou peut pénétrer dans l’environnement en une quantité ou concentration ou dans des conditions de nature à : avoir, immédiatement ou à long terme, un effet nocif sur l’environnement ou sur la diversité biologique; mettre en danger l’environnement essentiel pour la vie; constituer un danger au Canada pour la vie ou la santé humaine.
De manière générale, des essais sont réalisés pour établir la toxicité d’un effluent. Ces essais sont divisés en deux catégories : les essais de toxicité chronique et les essais de toxicité aiguë sur des organismes sensibles aux contaminants. La première catégorie permet d’estimer les effets à long terme d’un effluent en observant les habiletés d’un organisme à l’étude à se reproduire, à croître et à démontrer un comportement normal. Les essais de toxicité aiguë visent, quant à eux, à estimer les effets à court terme de l’effluent, dont la mortalité et la mobilité. De manière générale au Canada, la réglementation en vigueur définit les paramètres des essais pour évaluer la toxicité aiguë, car cela permet d’évaluer rapidement les risques immédiats pour la vie aquatique et d’agir rapidement pour en diminuer les impacts.
La réalisation d’essais de toxicité présente plusieurs avantages. De tels essais permettent de mesurer les effets toxiques de l’effluent, qui sont souvent causés par un contaminant ou une combinaison de contaminants et facteurs. Ces essais sont appliqués sur quelques espèces cibles (témoins) sélectionnées pour leur sensibilité aux substances nocives et leur présence dans les principaux écosystèmes visés ; ils donnent une idée générale des effets de l’effluent sur le milieu récepteur. Malgré les avantages de cette méthode d’analyse, les résultats des essais ne donnent aucune indication sur le ou les substances pouvant causer la toxicité. L’origine de la toxicité peut être unique, multiple et complexe; elle doit donc être établie en réalisant une investigation méthodique afin de proposer une filière de traitement adéquate et conforme.
Une investigation poussée
Afin d’évaluer l’impact des effluents miniers sur les milieux récepteurs, plusieurs paramètres liés à la qualité de l’eau sont analysés avant le rejet des eaux traitées. Les métaux lourds, les hydrocarbures et les matières en suspension, pour n’en nommer que quelques-uns sont quelques paramètres à analyser d’un effluent minier et font partie des paramètres réglementés.
Toutefois, dans certaines situations, la composition des effluents est complexe, et même en diminuant les concentrations des contaminants sous les seuils réglementaires, les interactions chimiques entre les différents composés de la matrice d’un effluent auront un impact sur la toxicité.
Une bonne connaissance des procédés utilisés dans la mine ainsi qu’une très bonne caractérisation des effluents permettront de mieux déterminer les interactions entre les différents produits utilisés dans les procédés et en définitive, de bien investiguer la problématique. En fait, une étude sur l’identification et la réduction de la toxicité et des produits toxiques[1] pourrait servir de base en vue d’établir les étapes et la séquence d’investigation de la problématique.
Une compréhension adéquate de la physico-chimie de l’effluent pourra permettre d’anticiper certaines interactions et de remédier au problème.
S’appuyer sur la physico-chimie
Quelques paramètres, tels que le pH, la conductivité, le potentiel d’oxydoréduction, l’oxygène dissous, la dureté et l’alcalinité, pourront aider à caractériser l’effluent et à cibler la ou les sources de toxicité.
Par exemple, l’alcalinité et la dureté sont des paramètres non normés qui, de manière générale, ont pour fonction respective de tamponner les acides et d’assurer la stabilité chimique de l’eau. L’ajustement de ces paramètres peut avoir des répercussions importantes sur la biodisponibilité des métaux dans l’effluent. Une augmentation de la dureté, principalement des ions calcium et magnésium dans l’eau douce, peut inhiber l’absorption de métaux par compétition sur les membranes cellulaires de certains organismes. L’ajustement de l’alcalinité, en ajoutant des carbonates, permettrait de modifier la spéciation chimique de certains métaux, de former des composés insolubles et de réduire ainsi les concentrations des espèces chimiques toxiques disponibles dans l’effluent. Dans une situation où l’effluent présente une alcalinité ou une dureté faible, il serait judicieux d’analyser l’impact possible d’une hausse de ces paramètres sur la qualité de l’effluent.
Les thiosels sont aussi un autre exemple de facteur lié à la toxicité de certains effluents miniers. Même si les thiosels ne sont pas reconnus comme des substances toxiques, leur oxydation se fait en consommant l’oxygène dissous et en relarguant des protons (H+) dans l’eau du milieu récepteur, provoquant ainsi une acidification retardée du milieu qui a une incidence sur la vie aquatique. Le seuil critique de thiosels rejeté dépendra donc de la capacité du milieu aquatique. Dans un milieu présentant un bon taux d’oxygène dissous et un bon pouvoir tampon, le rejet de thiosels aura peu d’impact. Toutefois, les concentrations rejetées dans un milieu fragile devront être plus limitées. Une bonne connaissance du milieu récepteur est ainsi un autre facteur important et déterminant dans la compréhension de la situation et de la sélection de la filière de traitement.
Une filière de traitement des eaux adaptée
Une bonne caractérisation de l’effluent et du milieu récepteur, comme expliqué précédemment, fournit des informations cruciales qui permettent de cerner les étapes nécessaires pour mettre au point une filière de traitement et/ou d’agir à la source afin de remédier à la toxicité. Un exemple qui illustre la nécessité de bien comprendre la physico-chimie d’un effluent est l’adaptation d’une filière de traitement pour l’azote ammoniacal. L’azote ammoniacal total est formé d’azote ammoniacal ionisé (NH4+) et non ionisé (NH3). Toutes deux sont toxiques, mais l’azote non ionisé représente la fraction la plus toxique. Même si la concentration d’azote ammoniacal totale peut respecter certaines recommandations sur la protection de la vie aquatique[2], une présence accrue de la forme non ionisée peut représenter un risque de toxicité lors du rejet.
Comme la concentration des fractions varie en fonction du pH, de la température et de la force ionique, l’ajout d’une unité d’ajustement du pH et l’imposition d’une cible opérationnelle de pH plus restreinte, par exemple, permettent de réduire la fraction non ionisée rejetée et de diminuer ainsi les risques de rejet d’effluent toxique.
Une autre situation potentielle d’adaptation d’une filière de traitement est l’adaptation d’une chaîne de traitement biologique pour l’enlèvement des composés sulfurés ou azotés. La présence de certains métaux lourds – même à des concentrations plus faibles que celles permises par la réglementation – peut inhiber l’activité bactérienne, réduire les capacités de traitement de la filière et continuer à rendre l’effluent toxique. L’ajout d’une étape de prétraitement pour la précipitation et l’enlèvement des métaux en deçà des valeurs limites permises par la réglementation en amont du traitement biologique pourra améliorer grandement les performances des équipements de traitement biologique.
Pour conclure
Comme on peut le constater, afin de définir une chaîne de traitement des eaux, une bonne caractérisation de l’effluent et une connaissance aiguë du milieu récepteur permettront de cibler les substances et paramètres problématiques pouvant avoir un effet sur la toxicité de l’effluent. Une analyse rigoureuse telle qu’effectuée par une étude sur l’identification et la réduction de la toxicité et des produits toxiques permettra de bien définir : la problématique, la technologie de traitement des eaux à privilégier (et/ou l’intervention à la source requise, le cas échéant) et, par le fait même, le coût du projet.
Dans un contexte où le rejet d’un effluent toxique dans un milieu naturel peut influer sur l’opinion publique, une compréhension adéquate de la qualité de l’eau et un bon inventaire de tous les paramètres pouvant l’influencer permettront une ingénierie optimale qui respectera les critères environnementaux réglementaires et ceux définis par l’organisation, en plus de contribuer à l’acceptabilité sociale du projet.
Grâce à son approche holistique et participative des Clients, BBA peut déterminer les sources possibles des contaminants associés à la toxicité d’un effluent et assurer ainsi le respect des exigences réglementaires des effluents par la mise en place d’une solution adéquate. De plus, les équipes multidisciplinaires de BBA sont familières avec les procédés et les enjeux miniers afin de réaliser l’ingénierie d’une solution de traitement des eaux tout en s’arrimant avec vos capacités opérationnelle et financière.
Pour toute question à ce sujet, n’hésitez pas à communiquer avec nos experts en traitement des eaux.
Références
[1] Guide d’évaluation et de réduction des toxiques (GERT), Ministère de l’Environnement et de la Faune, Février 1996
[2] CCME, Recommandations canadiennes pour la qualité des eaux : protection de la vie aquatique, 2000, 2009 et 2010