Il est donc crucial qu’un système de protection passive contre le feu retarde l’augmentation de température de l’acier structural, pour préserver la stabilité du bâtiment ainsi que de permettre aux occupants de quitter les lieux et aux pompiers d’y entrer pour éteindre le feu.
Lorsqu’un incendie se déclenche dans une installation industrielle, l’acier doit garder son intégrité structurale suffisamment longtemps pour permettre d’évacuer les travailleurs de façon sécuritaire et de prévenir la défaillance des structures primaires. Cela a pour but d’atténuer les dommages causés aux équipements adjacents nécessitant un délai minimal pour le redémarrage de l’usine après un incendie.
Les lignes directrices concernant la conception de protection incendie des bâtiments sont publiées dans le Code national du bâtiment du Canada 2010 (Partie 3 de la Division B). Le code cite la norme des Laboratoires des assureurs du Canada (ULC), CAN/ULC-S101, « Méthodes d’essai normalisées de résistance au feu pour les bâtiments et les matériaux de construction ». Or, dans ces essais, les structures sont soumises à une courbe temps-température standardisée qui atteint 840 °C en 30 minutes. Ce scénario représente plutôt un incendie cellulosique (feu « sec ») pouvant se produire dans les bâtiments résidentiels et commerciaux.
Cependant, dans un complexe industriel, le feu est susceptible d’être beaucoup plus intense. On y rencontre principalement trois classes de feu : le feu de « gaz » (gaz naturel, butane, propane ou d’autres produits à l’état gazeux), le feu « gras » (hydrocarbures, goudron, graisses, huiles, peintures, vernis, alcools, solvants et autres produits chimiques) et le feu de « métaux », où les températures atteindront 1 000 °C en quelques minutes.
Puisque le code ULC-S101 ne couvre pas ce type d’incendie, il est important, dans le cadre d’un projet industriel, qu’un ingénieur spécialiste en santé, sécurité et environnement (SSE) soit impliqué dès le début du projet. Celui-ci participe aux activités d’identification des risques en SSE (HAZID « Hazard Identify ») et élabore un devis qui comprend les normes et règlements à respecter en matière de SSE. Selon le type d’industrie, il identifie le classement de feu, définit les dimensions de l’enveloppe des scénarios d’incendie, évalue l’indice de résistance au feu et précise la durabilité du revêtement de protection à appliquer sur les installations (équipements, tuyauterie ou structures) identifiées comme à risque d’incendie.
En se référant à ce devis, l’ingénieur en structure conçoit l’ignifugation des structures. Le choix des matériaux doit être coordonné étroitement avec la constructibilité, à savoir si le revêtement sera appliqué sur les membrures en usine ou sur le site, si la structure ignifugée sera modulaire, installée sur place ou levée avec une grue dans sa position permanente.
C’est l’ingénieur en structure qui doit maîtriser la hiérarchie de transfert des charges pour pouvoir déterminer les membrures primaires devant être ignifugées. Il doit aussi sélectionner la nuance d’acier, le niveau de contrainte, le type de profilé, la condition de liaison et de chargement ainsi que le facteur de massivité (rapport de la surface exposée au flux thermique au volume par unité de longueur). L’acier « lourd » nécessite moins de protection ignifuge que l’acier « plus léger ». D’une manière générale, la « lourdeur » de l’acier est déterminée par le rapport du périmètre exposé au feu à sa section transversale. Plus le ratio est élevé, plus la protection contre le feu requise est élevée.
Dans l’industrie de la pétrochimie, du pétrole et du gaz, c’est la norme ANSI/UL 1709 « Standards for Rapide Rise Fire Tests of Protection Materials for Structural Steel » qui est souvent utilisée. Les essais évaluent la performance d’un matériau dans un four capable d’atteindre 1 103 °C en cinq minutes de fonctionnement. Les matériaux doivent fournir une protection contre le feu pour que l’équipement conserve