Cet article est paru dans la revue Ressources Mines et Industrie en juin 2017.
Une chaîne de production typique de l’exploitation minière consiste en l’extraction du minerai, le traitement du minerai et l’expédition du concentré aux raffineries. Ces installations minières comportent de multiples sous-processus, chacun étant hautement complexe, qui dépendent du bon fonctionnement de chacun afin de produire un concentré de haute qualité. Une gestion efficace des interactions intraprocessus et interprocessus assurera ainsi un bon rendement à l’installation minière.
La complexité du schéma de procédé d’une installation minière est due à l’interdépendance des multiples équipements et aux multiples flux recirculés. Il peut ainsi s’avérer difficile de prédire l’impact de la variabilité de la composition du minerai et du taux de production sur la qualité du concentré produit. C’est pourquoi il est maintenant pratique courante d’utiliser la simulation pour optimiser les performances d’une installation minière, afin d’en maximiser son efficacité et sa rentabilité.
La simulation est d’abord utilisée lors du processus de conception et d’ingénierie d’une installation minière. Le concepteur a recours à des logiciels spécialisés pour faciliter la production des bilans de matière et d’énergie. Ces logiciels permettent d’élaborer plusieurs schémas de procédé avec rapidité et exactitude, tout en tenant compte de nombreux critères de conception et d’opération. Il s’agit de bilans statiques décrivant la répartition de la matière et de l’énergie en régime permanent. Ces logiciels permettent également d’étudier la propagation de la variabilité des flux dans un schéma de procédé sous différentes conditions d’opération.
La simulation facilite également la mise en oeuvre d’une usine. On s’intéresse ici aux particularités liées au démarrage et à l’augmentation progressive du tonnage pour atteindre la production nominale. Le comportement transitoire des équipements est alors de grand intérêt. De par leur nature, les logiciels spécialisés en simulations statiques ne peuvent aborder cette problématique et laissent ainsi place aux logiciels spécialisés en simulation dynamique. En modélisant le comportement transitoire des équipements, la simulation dynamique permet de :
- Vérifier que la production désirée peut être atteinte avec le schéma de procédé élaboré et les équipements dimensionnés.
- Évaluer l’impact des capacités des réservoirs tampons sur la disponibilité globale du concentrateur, advenant un arrêt non prévu.
- Identifier les goulots d’étranglement et les sources d’engorgement possibles.
- Valider les séquences de démarrage et d’arrêt des équipements de chaque secteur de l’usine.
La simulation dynamique peut également servir d’outil de formation interactif pour les nouveaux opérateurs. Le simulateur est conçu pour émuler le comportement du procédé à la suite d’un changement de consigne, de condition d’opération ou de composition chimique du minerai. Les mises en situation sont élaborées à partir de données de production réelles, provenant des systèmes de gestion des informations de l’usine, des analyses de laboratoire et des données archivées. L’opérateur peut vivre une expérience encore plus réaliste si le simulateur est relié à une interface homme-machine. Ainsi, avant même d’opérer le procédé, le nouvel opérateur peut comprendre et maîtriser l’impact des changements de consigne et des perturbations sur la qualité du concentré.
Enfin, la simulation dynamique permet de valider les stratégies de contrôle. La performance d’une nouvelle stratégie de contrôle et son impact sur la production et la qualité du concentré peuvent être étudiés par l’intermédiaire d’environnements d’essais virtuels, ce qui permet de justifier son implantation. Des correctifs peuvent également y être apportés avant même qu’elle ne soit implantée, réduisant ainsi les efforts de déverminage en chantier. Par ailleurs, le simulateur peut aussi servir à former les opérateurs sur l’utilisation de la nouvelle stratégie. Cela permet de réduire des pertes de production au moment où la stratégie sera mise en service.
Malheureusement, aucun logiciel ne permet de simuler toutes les applications. L’enjeu principal réside donc dans le choix du meilleur simulateur pour accomplir des objectifs bien précis.
Au fil des années, plusieurs logiciels spécialisés en production de bilans de matière et en dimensionnement des équipements ont été commercialisés. Certains abordent des problématiques spécifiques à un type de procédé métallurgique alors que d’autres sont plus polyvalents.
Néanmoins, la précision des calculs et la fiabilité des résultats produits par ces logiciels reposent entièrement sur la qualité des critères de conception utilisés :
- Lors des études de portée, des critères de conception typiques ou présumés sont d’abord utilisés pour élaborer une multitude de bilans de matière préliminaires, dont chacun présente un changement conceptuel majeur par rapport à l’autre.
- Lors des études de préfaisabilité et de faisabilité, le bilan de matière conservé est précisé. Pour ce faire, les critères de conception présumés sont validés, entre autres, à partir de références industrielles et d’essais métallurgiques en laboratoire ou provenant d’une usine pilote.
- Lors de l’ingénierie de détail, le comportement et le dimensionnement des équipements dans des scénarios de production minimale, nominale et maximale sont émulés à partir d’essais métallurgiques fiables et précis.
Les équipements produisant les meilleurs rendements sont alors sélectionnés pour achat. Les logiciels commerciaux spécialisés en simulation dynamique de procédés métallurgiques sont beaucoup moins nombreux et nécessitent davantage de programmation. Les modèles dynamiques utilisés – empirique, phénoménologique, déterministe, stochastique – sont choisis selon la complexité de la simulation désirée. La programmation de scénarios dynamiques de production peut ainsi nécessiter beaucoup de temps, d’efforts et d’investissements. De plus, la validation des comportements transitoires émulés peut constituer un défi, étant donné la complexité des modèles dynamiques implantés. Dans tous les cas, une étude de compromis doit être réalisée entre les coûts d’investissement et les retombées économiques.
Néanmoins, la simulation fera désormais partie intégrante du processus de conception, d’optimisation, d’automatisation, d’évaluation économique et de prises de décision d’une exploitation minière. Une application efficace de la simulation permettra d’augmenter l’exploitabilité et la sécurité d’une installation minière. Dans un contexte économique difficile, où les coûts de production sont élevés, la simulation peut ultimement assurer le succès financier d’un projet minier.